Il y a eu des traîtres fameux dans l’histoire de la politique universelle, et quelques beaux spécimens au Sénégal depuis l’accession à l’Indépendance. Il me semble quand même que par le passé, des traîtres, beaucoup plus subtils, s’échinaient à ne pas revendiquer leur traîtrise, la cachaient, l’enrobaient d’excuses oiseuses qui ne trompaient personne en réalité, mais il y avait au moins l’effort de ne pas plastronner après une félonie. Même Judas, figure tutélaire de la traîtrise dans l’imaginaire, a eu des remords et fut acculé au suicide. Signe que la traîtrise n’est jamais un acte anodin.

Il semble que cette période où on rougissait de trahir soit révolue. Le traître n’agit plus en souterrain, il ne rase plus les murs après son coup de couteau dans le dos. Non, il revendique sa traîtrise, s’en vante, et organise une conférence de presse pour la révéler à la face du monde.

Tel Adama Fall, gonflé de morgue, qui avoue sans sourciller et avec jubilation avoir dérobé la clés USB dans laquelle se trouvent les fichiers de la collecte de parrainages de son désormais ex allié Mame Boye Diao, qu’il a lâché pour rejoindre Amadou Bâ.

Cette scène pour le moins hallucinante et scandaleuse, sauf apparemment pour son principal protagoniste, est une honte pour la coalition Benno Bokk Yakaar qui n’est pas à son coup d’essai. Rappelons qu’en 2021, le e chef de l’Etat a cru bon de recevoir en audience Djibril Ngom, l’ex mandataire de la coalition Yewwi Askan Wi du département de Matam, accusé de s’être volatilisé avec les listes de ladite coalition avant de rejoindre la mouvance présidentielle.

Je ne suis pas sûr que le Premier ministre Amadou Bâ obtienne un quelconque gain politique avec de tels transfuges, dont la loyauté est à géométrie variable. Les Sénégalais ne veulent pas d’une République des traîtres et du trafic d’influence. Et ça il faut que les hommes politiques, notamment les tenants du pouvoir, soient bien déconnectés pour ne pas s’en rendre compte.