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COP28: dès l’ouverture, une avancée majeure sur les pertes et dommages pour les pays en développement
weli info avec rfi
jeudi 30 novembre, 2023 - 21:12

La mise sur pieds de ce fonds consacré à la réparation des catastrophes climatiques a été, à la surprise générale, adoptée dans les deux premières heures de la conférence climat de l’ONU, ce jeudi 30 novembre à Dubaï. ONG et experts saluent une victoire, mais savent qu’il reste beaucoup à faire pour le rendre réellement utile. C’est en tout cas de bon augure pour désormais progresser sur les autres dossiers chauds, comme les énergies fossiles.

À l’instar de la COP27 qui avait accouché de ce fonds sur le papier au premier jour de la COP, la 28e commence un an plus tard sur un coup de théâtre : l’adoption universelle de sa mise en œuvre. Il a été pour cela été doté d’une salve de contributions financières qui en appelle d’autres afin de le rendre réellement fonctionnel.

La décision a été saluée par une standing ovation dans la salle plénière de l’Expo City, aux portes de Dubaï qui accueille cette année la conférence des Nations unies sur climat. Les sourires, généralement rares sur le visage des diplomates et négociateurs, se sont dessinées sur les lèvres et des applaudissements nourris ont retenti dans la salle.

Il faut dire que ce compromis revient de loin. Il a été négocié pendant neuf mois et, au bout de cinq réunions, il ne convenait à aucune partie prenante. « Mais le rouvrir présentait le risque de le voir affaibli ou qu’il n’y ait pas d’accord du tout », assure pragmatique Fanny Petitbon, experte de ce sujet à l’ONG Care au sortir de la séance. Qui se réjouit : « Premier jour, premier acte très fort. Ce qui se passe aujourd’hui c’est l’aboutissement de 30 ans de lutte acharnée pour les pays en développement qui criaient à l’aide face à la montée du niveau des mers, face aux sécheresses, face à des conséquences dont ils ne sont pas responsables et pour lesquels ils n’ont pas les moyens de lutter. En moins d’une année, on obtient un accord pour le mettre sur pied. Pour suivre ce sujet depuis dix ans, j’en ai vraiment la chair de poule. »

« Des débuts constructifs »

Le texte adopté prévoit d’abord l’installation d’un conseil d’administration de 26 États – 14 en développement, 12 développés. Il aura la (très lourde) tâche de définir les contributeurs, les bénéficiaires et les critères d’accès à cette sorte d’assurance tout risque d’un nouvel âge. La structure sera hébergée par la Banque mondiale pour quatre années. Le fonds sera opérationnel dès l’année prochaine. Il permettra à l’ensemble des pays en développement d’accéder aux financements. Et pas seulement aux gouvernements : des communautés locales pourront directement recevoir de l’argent, ici pour reconstruire une maison, là réhabiliter un champ ou reconstituer des troupeaux par exemple, mais aussi pour fuir leur île rongée par l’eau et commencer une nouvelle vie ailleurs. Pour évaluer les besoins, un mécanisme déjà créé depuis des années doit également faire l’objet de décision à cette COP.

Enfin, les pays les moins avancés dans leur développement et les petits États insulaires – à l’origine, il y a 30 ans, de cette demande de capital dédié – auront une compensation garantie. Méfiante, leur alliance (Aosis) a promptement réagi auprès de l’AFP : « Le travail est loin d’être achevé. On ne sera pas tranquilles tant que ce fonds ne sera pas financé convenablement et commencera à alléger le fardeau des communautés vulnérables. »

Cette décision majeure place cette COP, mal engagée sur de nombreux chantiers, sous de biens meilleurs auspices pour la suite des négociations. « Je félicite les partis pour cette décision historique. C’est un signal positif pour le monde et pour notre travail », a déclaré Sultan al-Jaber, le président de la COP. « Nous avons écrit une page d’histoire aujourd’hui… La rapidité avec laquelle nous l’avons fait est inédite, phénoménale et historique. » « Les Émirats arabes unis engrangent une belle victoire qui donne des débuts constructifs à cette COP et positionne la présidence comme une présidence qui parvient à ses fins », atteste Lola Vallejo, directrice climat au groupe de réflexion français Iddri.

Madeleine Diouf Sarr, présidente du groupe des Pays les moins avancés, qui représente 46 des nations les plus pauvres, a salué, elle aussi, une décision d’une « signification énorme pour la justice climatique ». « Mais un fonds vide ne peut pas aider nos citoyens », a-t-elle souligné.

Le fonds a bien commencé à se remplir : « il y a eu 200 millions de dollars en 20 minutes », a réagi en plénière, les yeux écarquillés, un diplomate zambien, appelant les pays développés à poursuivre cet effort. Cette mise était de toute façon nécessaire à sa création. Les Émirats ont versé la moitié dans l’escarcelle pour montrer l’exemple et s’assurer un beau point diplomatique pour légitimiser leur présidence, controversée qui plus est. Puis, c’est la rincée : l’Union européenne aligne 225 millions (dont 100 de l’Allemagne), le Royaume-Uni 50 millions, les États-Unis 17,5 millions, le Japon 10. Presque 400 millions de dollars promis au total. « Formellement, les Émirats arabes unis sont un pays en développement et c’est assez incroyable de son propre chef décide de contribuer à un fonds multilatéral. À cette ampleur, c’est inédit, remarque Lola Vallejo. C’est une façon de dire qu’ils font aussi partie de la solution et participent à l’effort de solidarité internationale, alors qu’ils ont été sous le coup de la pression internationale pour les profits exceptionnels engrangés ces dernières années. »

D’autres contributions ont été promises lors de cette séance plénière et devraient être formulées au cours des prochains jours, mais dépendra de la suite des négociations. La Norvège par exemple, volontaire pour participer, rappelle qu’en parallèle de « l’espoir » pour les « pays vulnérables », des « pas significatifs » doivent être accomplis pour l’atténuation, c’est-à-dire la réduction des gaz à effet de serre.

Mais au regard des besoins, estimés par une étude en 2018 à 590 milliards dollars d’ici 2030 pour les pays du Sud pour les seules pertes économiques. C’est une goutte d’eau, « le strict nécessaire » pour pouvoir créer le fonds, critique amèrement Fanny Petitbon. Les pertes et dommages (ou préjudices) désignent ces catastrophes, humaines et matérielles, au caractère irréversible : phénomènes extrêmes (cyclones, inondations, sécheresses…), mais aussi phénomènes à occurrence plus lente, comme la montée du niveau des mers, la disparition de patrimoine ou de ressources pour vivre. En 2022, les destructions consécutives à de gigantesques inondations au Pakistan ont été évaluées à 40 milliards de dollars.

L’économiste Avinash Persaud, bras droit de la Première ministre de La Barbade Mia Mottley, a également réagi en début de soirée, sous les arcanes du centre des expositions : « C’est un jour véritablement historiquement que nous avons attendu depuis très longtemps, en particulier dans les petites îles. Avec ce manque, nous avons créé le nœud de la dette climatique : tous les États les plus vulnérables coulent sous un océan de dettes, car ils doivent reconstruire sans argent. Ce fonds, c’est ça : reconstruire en mieux les maisons de fortune balayées par les eaux. »

 

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