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Travail de Titan des académiciens de la langue wolof
Le360Afrique
lundi 12 octobre, 2020 - 1:42

En février 2018. trois amis soucieux de la nécessité de vulgariser à large échelle l’enseignement de la langue wolof, décident d’en relever le défi en se servant des nouvelles technologies. Ils n’ont pas les moyens financiers de leur projet, mais ont des idées plein la tête et se sentent capables de soulever des montagnes.

C’est ainsi que le groupe « Jàng Wolof » (apprendre le Wolof) est né. Mais très vite, ses fondateurs sentent qu’il faut en faire beaucoup plus. Ils changent alors le nom qui devient « Wolof Ak Xamle » (WAX, Wolof et transmission de connaissance) WAX étant aussi l’anagramme du mot signifiant « parler » en wolof.

Aujourd’hui WAX a ouvert des classes virtuelles via la messagerie Whatsapp, mis en place un site d’enseignement à distance, traduit des œuvres littéraires ou scientifiques, alimente en articles divers, a aussi créé un site d’information à savoir … Bref, c’est un travail de Titan qui est en train d’être abattu par ces volontaires déterminés à donner au wolof une place non seulement sur le Web, mais également en incitant la population et l’administration à l’utiliser de manière académique. L’objectif ultime étant d’en faire la langue utilisée dans les correspondances, les textes juridiques, les tribunaux et la transmission des connaissances de toutes sortes.

Car, « la chance du Sénégal est justement d’avoir à sa disposition une langue comprise et parlée par plus de 95% de la population, alors que moins de 20% des Sénégalais parlent ou écrivent couramment le français. Il faut y ajouter les 84% de Gambiens et 37% de Mauritaniens qui sont également wolofophones », argumente Seex Lóo, l’un des deux hommes à l’origine de ce vaste projet et actuel responsable du groupe WAX.

Selon lui, on ne peut pas développer un pays avec une langue que même le tiers de la population ne parle pas.

Afin de réussir cette difficile phase de généralisation du wolof académique, les membres de Wax s’interdisent d’utiliser le moindre mot en français pour communiquer. Ils banissent les termes les plus techniques et les plus recherchés, mais également ceux tellement ancrés dans le parler quotidien des Sénégalais qu’ils finissent par être wolofisés. Ainsi, ils ne disent pas « téléphone », mais « jollasu ». A la place de « numéro », ils emploient le terme wolof « limat ». Un « ordinateur » est appelé « nosukaay », l’épidémie « mbas », et ainsi de suite.

Face à leurs détracteurs qui estiment que les langues africaines ont pris du retard et ne peuvent pas être des supports d’enseignement des sciences, ils ont trouvé une belle parade, puisque la plupart des termes de physique, de chimie, de sciences de la vie et de la terre sont déjà dans leur dictionnaire. Certains ont même déjà retrouvé leur place dans Wikipedia en wolof, qui s’enrichit quotidiennement de nouveaux articles. Ainsi, si peu de Sénégalais connaissent le terme d’électron, sa traduction par « mbëjfepp », contraction d’électricité (mbëj) et de grain (fepp) peut être facilement mémorisée. Sur le même principe, un proton est appelé « feppsalal », etc.

Les membres de Wax peuvent tenir une conversation, aussi longue soit-elle, sans y inclure le moindre mot emprunté au français. Et ce vocabulaire est soigneusement consigné dans un dictionnaire de plus de 60.000 mots.

« A partir de là nous avons mis en place une cellule dénommé « Tekki », c’est-à-dire « traduction », permettant d’attaquer ce vaste chantier qui consiste à élaborer un outil efficace de traduction simultanée, devant être mis à la disposition des entités gouvernementales, de Google, Facebook… », affirme Seex Lóo.

Mieux, à l’écrit, les membres de Wax sont de véritables experts de la grammaire wolof, connaissant parfaitement les racines des mots, les quelques préfixes (njëkkaan) et les dizaines de suffixes (toppaan) qui font la richesse de la langue wolof, mais également les différentes formes de conjugaison qui font qu’une longue phrase peut-être résumée en seul verbe.

Actuellement, bien que n’ayant pas de statut d’association, le groupe Wax fait montre d’une grande perspicacité en termes d’organisation. En effet, elle comprend trois sous-groupes auxquels reviennent des missions bien précises. « Ainsi, « Njàng mi » s’occupe de l’enseignement avec trois démembrements de trois niveaux chacun. Les élèves qui y entrent suivent une formation qui dure de trois à six mois, selon la disponibilité des élèves et leur degré d’engagement », précise Seex Lóo.

Et d’ajouter: « Au terme de cette formation accélérée, les apprenants sont censés recevoir un diplôme, mais il faut qu’ils participent au préalable en tant que bénévoles aux nombreuses missions de Wax, soit dans l’éducation-formation, soit dans la traduction des ouvrages, etc. »

Le sous-groupe « Caabal gi ak Xaarala gi » ou « Médias et sciences » tient un site internet d’information qui est régulièrement alimenté en nouvelles fraîches en langue wolof. C’est également lui qui alimente Wikipedia en articles dans la langue de Kocc Barma, ce philosophe wolof du XVII

Enfin, le sous-groupe « Lef mi » a pour principale mission l’enrichissement et la codification des règles de grammaire wolof, l’enseignement spécialisé des mathématiques et des autres sciences, les traductions de divers ouvrages. C’est d’ailleurs ce groupe qui est actuellement en train d’éditer le premier vrai dictionnaire wolof unilingue aux 60.000 références.

Le seul regret des membres de WAX est évidemment le manque de ressources financières, puisque ce travail colossal est abattu uniquement sur la base du volontariat et des cartes de membres cédées à moins d’un euro. « Des soutiens de la part de bonnes volontés soucieuses de la langue, notamment via le system de paiement, mais également des autorités gouvernementales seraient les bienvenus », conclut-il.

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